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Major Benjamin F. Kendig.
Pilot - 44th Troop Carrier Squadron, 316th Troop
Carrier Group.
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Il était connu que
notre groupe fut transféré à partir de la Sicile
en Angleterre pour participer à l'invasion du continent européen.
Même la radio allemande annonça notre arrivée
et nous souhaita la bienvenue au Royaume-Uni. Bien sûr elle
nous promis aussi de tous retourner chez nous dans des cercueils.
Mon nom est Ben Kendig et
j'étais le commandant du 44th Troop Carrier Squadron du 316th
Troop Carrier Group. Au moment de l'invasion de la Normandie (Jour-J)
nous étions outremer depuis 1 an et demi. Notre groupe participa
au débarquement en Sicile avec deux parachutages de nuit.
Le second parachutage rencontra des tirs violents (la plupart du
temps prétendus "amis"). Notre groupe perdit
12 appareils sur 36. Bien que nous ne le laissions pas paraître,
nous ressentions tous de l'appréhension au sujet des plans
de l'invasion qui se profilait dans notre avenir.
Après l'arrivée
en Angleterre, nous nous sommes rapidement adaptés à
notre nouveau pays et d'une certaine façon, grâce à
de nombreuses similitudes, nous nous sommes sentis comme à
la maison. Nos jours et nos nuits furent remplis de missions de
ravitaillement en Angleterre et en Ecosse ainsi que de nombreux
vols d'entraînement aux formations de nuit. Un de ces vols
en formation de nuit se termina en tragédie avec la collision
de deux avions en vol. L'avion de tête, qui avait à
bord en tant qu'observateur le commandant du Groupe, fut heurté
par l'avion d'un élément suivant lors d'un changement
de cap autour d'une balise. Tout le personnel à bord des
avions fut tué. Le commandant du groupe, Col. Burton Fleet,
était mon chef d'escadrille avant qu'il ne soit transféré
au quartier général du Groupe. Cet accident naturellement
nous affecta tous. Il y avait la douleur profonde causée
par la perte de nos amis mais aussi la prise de conscience que le
vol en formation de nuit, exigé lors de l'invasion, pourrait
être bien plus dangereux.
Un jour nous reçûmes
des visiteurs. C'étaient des membres de la 82nd Airborne
qui avaient installé leur camp dans l'enceinte de Cottesmore.
Il n'y avait aucun doute maintenant que nous participerions à
l'invasion ! Nous les transporterions en un aller simple vers un
endroit non encore connu du continent. Nous n'avons certainement
pas envié leur position. Leur campement était isolé
et nous n'avons pas pu parler avec eux avant qu'ils n'embarquent
dans nos avions. Moins un individu connaît d'une opération,
meilleure est la chance de préserver le secret de l'ennemi.
Comme j'étais le chef
d'escadrille, je fus informé de l'opération quelque
temps avant le reste de l'escadrille elle-même. Je ne me rappelle
plus l'exact déroulement des activités précédant
l'invasion. Nous sommes allés à un terrain d'aviation
voisin pour écouter un discours et recevoir un message du
général Eisenhower. Puis survint le décalage
de la mission pour 24 heures à cause du temps. J'ai poussé
un soupir de soulagement mais réalisé que cela signifiait
un jour de plus d'anxiété !
Avant l'invasion et en supplément
des nombreux vols en formation de nuit, nous avons eu des exercices
avec les gaz et un entraînement à la vision nocturne.
Pour les gaz nous devions mettre nos masques et marcher au travers
de tentes emplies de fumée. L'entraînement à
la vision de nuit consistait à porter des lunettes aux verres
teintés en rouge (dans un gymnase obscurci) et à jouer
avec une grande balle blanche. Nous fûmes également
entraînés à l'identification d'avions et à
lire des textes projetés faiblement sur le mur d'une salle
obscurcie. Durant la mission nous portâmes des combinaisons
imprégnées, des masques à gaz et des casques
en acier. Nous ne ressemblions certainement pas à des membres
d'équipage.
Je ne peux expliquer mes
sentiments mais, à chaque mission, j'étais soulagé
quand nous mettions en marche les moteurs et étions prêts
à partir. Alors l'anxiété me quittait et ce
n'était plus que du travail. Nous nous sommes alignés
avec nos charges de parachutistes et containers. Le 44th Squadron
était en tête avec le commandant du groupe de transport,
le Colonel Washburn, dans l'avion de tête. J'étais
numéro dix, emmenant le second élément de neuf
avions du 44th Squadron. Le groupe se composait de quatre Squadrons.
Chaque Squadron se composait de 18 avions. Malgré le grand
nombre d'avions, le décollage et la formation furent sans
histoire. Nous nous dirigeâmes alors vers notre point de départ
de la côte d'Angleterre.
Nous traversâmes la
Manche sans aucun problème ; volant à environ 2000
pieds au-dessus des flots. Comme nous approchions de la côte
Normande nous trouvâmes une formation nuageuse juste en dessous
de notre altitude de vol. Ma première pensée était
que les Allemands avaient dispersé du gaz dans la zone. La
formation nuageuse semblait s'étendre en rangées et
il me semblait qu'elle avait pu être dispersée par
des avions. Je réalisais vite que mon imagination travaillait
trop ! Les nuages étaient une formation naturelle et auraient
pu résulter du vol des avions nous précédant
au travers d'un air saturé, le faisant condenser en nuages.
Comme nous approchions de
la zone de largage, je fus confronté à une décision
importante ! Etait-il meilleur de perdre de l'altitude et de voler
au travers des nuages avec le risque d'une rupture de la formation
et la possibilité de collisions en vol ou rester au-dessus
et larguer les parachutistes à une altitude qui leur causerait
une grande dispersion ? Nous captâmes bientôt le signal
radar des éclaireurs ! A environ 5 miles de la zone de largage
la couche nuageuse se termina et je pus clairement apercevoir les
lumières placées par les éclaireurs. J'ai immédiatement
réduit les gaz et commencé à descendre. Je
réalisais rapidement devoir remettre de la puissance, ma
formation rattrapant mon propre avion. Au moment ou nous atteignîmes
la zone de largage nous étions un peu en dessous de 500 pieds
(165 mètres) et à une vitesse légèrement
supérieure à celle requise pour les troupes. Cependant
c'était, à mon avis, meilleur de larguer à
ce moment plutôt que de cercler et de risquer une collision
avec la formation me suivant.
Après le largage des
troupes nous volâmes aussi bas que possible et bientôt
atteignîmes la côte. Je ne sais pas si j'ai rêvé
cela ou pas mais, comme nous atteignions la côte, j'ai pensé
que je pourrais voir les tranchées et les soldats. Je ne
me rappelle pas avoir vu beaucoup de tirs venant du sol. Comparé
à la seconde nuit au-dessus de la Sicile c'était du
'petit lait'. Le reste du voyage de retour vers notre base fut sans
histoire. Nous nous sommes tous sentis soulagés d'apprendre
qu'il y avait eu peu de pertes. Je pense que notre groupe n'a perdu
aucun avion cette nuit là.
Plusieurs explications sont
nécessaires. Les éclaireurs étaient un groupe
d'équipages et de parachutistes hautement entraînés
à la navigation avec les derniers équipements radar.
Avant notre largage ils localisèrent les zones de saut et
les marquèrent avec des signaux lumineux et radar pour nous
guider vers elles. Chacun de nos avions de tête était
équipé du radar Rebecca-Eureka avec un écran
sur le tableau de bord donnant la direction et la distance vers
le signal des éclaireurs. Une autre explication concerne
notre vol en formation de nuit. Chaque avion possédait trois
lampes violette sur chaque aile et trois sur le dessus du fuselage.
Elles étaient seulement visibles du quart arrière
à la condition que la formation soit assez serrée.
Les tubulures d'échappement possédaient des caches
afin qu'elles ne soient pas visibles du sol et puissent présenter
une cible.
Ce récit est aussi
précis que ma mémoire me le permet. Je ne l'ai certainement
pas inventé et je le pense être assez près de
la réalité. Ce fut une nuit que bon nombre d'entre
nous n'oublierons jamais !
Mon équipage pour
cette mission NEPTUNE BIGOT était le suivant
Copilote : 1st.Lt. Karol F. Rybos
Navigateur : 1st.Lt. Donald W. Ertel
Chef d'équipage : T/Sgt. Donald M. Ashling
Opérateur Radio : S/Sgt. James R. Taylor
Benjamin Kendig (24 Septembre 2002)
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