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Sgt. Michael N. Ingrisano, Jr. ASN 12129759.
Radio Operator - 37th Troop Carrier Squadron, 316th
Troop Carrier Group.
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Opérateur radio, Appareil
N° 43-15510 ; Identification escadrille : W7 ; N° de nez
: 25 ; Lettre de queue : F. Le numéro pour l'opération
'Neptune-Boston' le Jour-J était le 50. Décollage
de Cottesmore, Angleterre, transportant des éléments
du 505th PIR, 82nd Airborne, 3rd Battalion, commandés par
le Lt. Col. Edward C. Krause.
Le témoignage du Pfc.
Leslie Palmer Cruise, Jr. H Company, 505 PIR peut appartenir à
notre escadrille dans la mesure où le colonel Krause à
sauté de l'avion leader piloté par le Lt. Col. Leonard
C. Fletcher ; co-pilote : Capt. Warren D. Rayburn ; navigateur :
Capt. Frank B. Waters, Chef d'équipage : T/Sgt. Wilbur E.
Evans, radio opérateur : Sgt. Maurice Smith. (voir photo,
p. 53, VALOR WITHOUT ARMS). Appareil N°: 43-30652; Numéro
37.
Souvenirs personnels
Mes souvenirs personnels des évènements aboutissants
au Jour-J en Normandie, le saut et les réactions au retour
de l'action commencent réellement le 12 Mai 1944 avec l'opération
" Eagle ".
L'opération "
Eagle " était la répétition pour la Normandie,
simulant le temps, l'itinéraire et le saut comme cela serait
réellement la nuit du 6 juin. La plus grande différence
était que, comme la 82nd Airborne était composée
d'un grand nombre de vétérans ayant participé
à l'invasion de la Sicile, il fut choisi d'avoir juste un
nombre symbolique de troupes sautant de notre avion, avec chaque
avion emportant un parachutiste ainsi qu'un observateur.
Le 316th Troop Carrier Group
avait également largué la 82nd au cours de ces missions
fatidiques en Sicile, " Husky 1 " et " Husky 2 "
les 9 et 11 juillet 1943. Au cours de " Husky 2 " le 316th
Group a perdu douze appareils abattus par des " tirs amis ".
La plupart de ces appareils furent abattus avec tous les hommes
présents à bord. Et la plupart des équipages
qui survécurent participèrent à la mission
en Normandie le Jour-J.
Le 12 Mai, l'opération
" Eagle " comprenait près de 800 avions des 52nd,
50th et 53rd Troop carrier wings. La 101st Airborne au complet devant
sauter des 50th et 53rd TCW.
Pour le 316th Group le vol
de nuit fut un vol de routine ; l'itinéraire préconisé
fut suivi, les nombres symboliques de troupes furent largués
sur la cible, mais au retour vers la base notre avion leader du
36th squadron, et l'avion leader du 44th squadron, se percutèrent
en plein vol, avec la perte des équipages. Parmi ceux qui
trouvèrent la mort se trouvaient notre commandant de groupe,
le Lt. Col. Burton R. Fleet et notre aumônier le Capt. Floyd
N. Richert, présents comme passagers/observateurs et deux
jumpmasters/observateurs, le Capt. John D. Rice, officier commandant,
compagnie B et le 2nd Lt. William A. Gullick, compagnie G, tous
deux de la 82nd Airborne.
L'impact de ces pertes a
été décrit plus tard par l'un des survivants
de l'invasion de la Sicile. Le Lt. Dwight Maul, 44th squadron, indiqua
: "Ce jour, (12 mai 1944), est sans aucun doute, dans mon esprit,
le jour le plus triste de ma carrière au sein du 44th TCS,
quand les avions du Col. Fleet et de Joe Shraber se percutèrent
en vol ". Joe Shraber était le compagnon de chambrée
de Maul.
La douleur de ces pertes
a imprégné le groupe tout entier. Mais selon le dicton
" un travail doit toujours être accompli ".
Avançons un peu dans le temps. Environ 1300 hommes de la
82nd Airborne furent déplacés sur notre base à
Cottesmore. Le groupe entier était isolé et en pleine
préparation pour le futur grand show.
Le
3 juin tous les personnels furent consignés à la base.
De notre côté, a tour de rôle, continuions nos
tâches, missions de routine dans le pays et entraînements
au vol de formation. Quand la rumeur parvint que la mission du Jour-J
était imminente, les briefings ont commencé pour les
pilotes, co-pilotes, navigateurs et opérateurs radio. Les
chefs d'équipage passèrent leur temps à préparer
au mieux leurs appareils pour des performances de pointe.
Puis quand la mission a été
confirmée, des briefings finaux furent tenus tôt dans
la journée du 5 juin. Tous les bras avaient préalablement
été réquisitionnés pour peindre les
bandes d'invasion sur tous les appareils. Chaque avion était
peint de cinq bandes, chacune d'une largeur de 61 centimètres,
trois blanches et deux noires sur chaque aile et sur la section
de fuselage entre la porte arrière et l'empennage. Cette
marque, identification visuelle pour tous les appareils alliés
était censée nous sauvegarder contre la possibilité
d'être abattu par un " tir ami ". - Fantômes
de la Sicile.
Nous avons dû alors
nous occuper de notre âme. Dans la mesure où je puis
me rappeler, aucun aumônier n'avait été nommé
pour remplacer le capitaine Richert. Aussi nous sommes allés
à la chapelle et chaque homme a prié selon sa propre
foi. Les catholiques, comme moi, ne purent obtenir le sacrement
de la confession et la pénitence. Je me suis toujours rappelé
non pas l'amertume mais un sentiment de vide et que je n'étais
pas préparé à affronter la mort tel que cela
m'avait été enseigné.
La décision finale
fut donnée par le général Eisenhower, après
un ajournement d'une journée dû aux conditions météorologiques,
du 5 au 6 juin. Les troupes aéroportées étaient
déjà aux avions, faisant leurs préparatifs
d'avant vol, quand nous arrivâmes vers 21h30. Nous avons rencontré
les gens des relations publiques (de notre bureau de renseignements)
qui nous ont remis une copie du message d'Eisenhower. J'ai plié
mon exemplaire, sans le lire, et l'ai glissé dans ma combinaison
de vol.
J'ai embarqué avec
mon équipement que j'ai déposé dans le compartiment
du poste de pilotage qui se trouvait derrière les positions
du pilote et co-pilote et juste devant mon propre emplacement.
Cet équipement se composait principalement de notre peu agréable
parachute siège et de nos armes qui, pour les hommes du rang,
consistaient en des carabines M1. Nous transportions aussi des masques
à gaz et des kits d'évasion. Tout identification personnelle,
hormis nos 'Dogs-tags' était restée dans nos quartiers.
Nous étions également
vêtus de guêtres et portions des casques, et nous avons
été équipés de vestes pare-balles, laquelle
j'ai choisi de placer sur mon siège plutôt que de la
porter. Mon raisonnement était de me protéger contre
des tirs provenant du sol.
Une fois ces tâches
effectuées, le chef d'équipage et moi sommes allés
à l'extérieur pour aider ces parachutistes surchargés
à grimper les trois marches qui les séparaient de
la carlingue. La porte arrière avait été précédemment
enlevée et les charnières protégées
avec du ruban adhésif afin d'empêcher qu'un homme n'y
accroche son parachute au moment où il quittait l'avion.
Le chef d'équipage est resté à l'arrière
de l'appareil pour travailler avec le jumpmaster, tandis que je
prenais ma position dans le poste de pilotage.
Le décollage du 44th
squadron eut lieu à 23h00. Le dernier avion du 36th squadron
décolla à 23h20. Mon avion était dans la cinquième
série et nous volâmes à droite de l'avion leader.
Notre cible était la drop-zone 'O' légèrement
au Nord-ouest de Sainte-Mère-Eglise.
Après nous être
placés en formation de vol, nous nous dirigeâmes vers
la France. Le vol était plutôt sans histoire. Mais
comme nous approchions les côtes de France, et me penchant
vers la gauche, je pus voir en avant de l'appareil. Je vis un mur
de lumière dans lequel je pus distinguer des éclats
de fumée noire (Flak et tirs d'armes légères,
pensais-je, n'ayant jamais rien vu de la sorte auparavant).
En raison du silence radio
mes tâches étaient très limitées. Aussi
je me déplaçais vers la position du navigateur car
il n'y avait aucune ouverture d'où je puisse voir de ma position.
Puisque seulement l'avion leader de chaque vol emportait un navigateur,
cet emplacement était vacant à bord de notre appareil.
Il y avait une petite ouverture d'environ 45 centimètres
de long et 10 à 15 centimètres de haut, que le navigateur
utilisait pour l'estime. C'est-à-dire regardant au sol des
sites connus, voies de chemin de fer, routes, etc.
Quand j'ai regardé
au dehors j'ai pu voir la vaste armada se tenant au large des côtes.
Puis je fus étonné de voir une femme, habillée
d'une robe blanche et se tenant assise sur notre saumon d'aile.
Je la reconnus immédiatement comme ma fiancée. Elle
se tourna vers moi, souris et me dis : " Mike, ne sois pas
inquiet, vous serez bien ", puis elle disparut.
Nous continuâmes notre
vol vers Sainte-Mère-Eglise. D'après les recoupements
que j'ai faits au cours de mes recherches, nos pilotes estiment
avoir largué notre stick de parachutistes légèrement
au Nord-ouest de la DZ.
Après avoir largué
nos troupes, j'ai aidé le chef d'équipage à
larguer une pièce de 75-mm que nous transportions et ensuite
l'ai aidé à rentrer les sangles d'ouverture des parachutes
à l'intérieur de l'appareil afin de minimiser la traînée.
Je me rappelle peu du vol
de retour. Au débriefing effectué par nos officiers
de renseignement tout ce dont je me rappelle fut le verre de scotch
qui fut donné à chacun de nous pour " calmer
nos nerfs ". Je me rappelle également le délicieux
petit déjeuner qui nous avait été préparé
quand nous nous sommes assis pour manger à environ 04h30
ce 6 juin.
Quand
je suis retourné à mon baraquement, situé de
l'autre côté de la rue, face au mess, je m'assis sur
mon lit, retirais le message d'Eisenhower de ma combinaison de vol,
le dépliait et le lu. Sur la face avant, dans le coin supérieur
droit, j'écrivis : " 6 Juin 1944 ". A l'arrière
j'écrivis : " Distribué à toutes les troupes
le Jour-j, 6 Juin 1944. Ordre du jour. Notez la crasse et la sueur.
Au dessous du mot " notez " je plaçais une flèche,
indiquant les marques de crasse et de sueur, qui soulignait la façon
dont le papier avait été plié. (Celui-ci a
été encadré et est accroché maintenant
dans mon bureau).
Dans un lettre datée
du 7 juin j'écrivis à ma fiancée : " Tu
m'as souvent entendu le dire, mais permet moi de me répéter
- Ce fut la prière la plus fervente que j'ai jamais réalisée.
"
Le 23 juin 1944 j'atterrissais
en France pour la première fois. Nous fournissions les rations
10 en 1 pour les Français, et transportions les blessés
dans les hôpitaux anglais. Comme nous revenions à Omaha-Beach,
nous volâmes au dessus du site juste avant de nous présenter
sur la piste d'acier. J'ai regardé par la fenêtre du
navigateur et j'ai vu sur le sol les sacs sanglants des corps des
soldats Américains qui avaient été tués,
attendant d'être enterrés.
Quand nous eûmes atterri
et roulé pour décharger notre cargaison, les infirmières
à bord des avions coururent pour aller cueillir des coquelicots
qui fleurissaient. Nous avons hurlé pour qu'elles s'arrêtent
car nous n'étions pas sûrs que le champ soit déminé.
Heureusement personne n'a été blessé.
En raison de la censure,
je ne pouvais décrire la vision que j'avais eue au cours
de la nuit de l'invasion. Dans une lettre du 5 juillet j'écrivais
:
" Je t'aime, chérie, je t'aimerais toujours. C'est une
chose que je ne puis traduire en mots. C'est une chose qui n'est
pas humaine. Je semble stupide et fou si je le mentionne. J'en ai
parlé à Harry (mon futur beau-frère, qui était
au quartier général de la IX Air Force) et il fut
assez aimable pour ne pas rire de moi. Je veux que cette fois tu
partages avec moi, pas seulement écouter ce que j'ai a dire.
Mon histoire de cette bonté divine pour m'aider à
réaliser notre futur. Puisque je ne peux peindre aucun tableau,
je peux te dire que ton nom, toi et tout en toi était mon
guide. Sauvegarde cette lettre, chérie, sauvegarde la. Ne
la perds jamais. J'aurais besoin d'elle pour traduire en mots, exprimer
ce que je ressens. Crois moi mon amour, si tu pouvais être
dans mon esprit pendant une heure, tu ne douterais jamais de moi.
Si tu étais avec moi en cette heure, tu rirais parce que
le bonheur dans ton cur et ton âme ne te permettrait
pas de pleurer. Je sais que cette lettre ne t'éclairera pas
tellement mais crois tout ce que j'ai dit. "
J'ai effectué approximativement
1500 heures de vol en 21 mois outremer. En plus de la mission de
Normandie, j'ai effectué quatre missions en Hollande (Market-Garden)
et la dernière mission (Varsity) en Allemagne. En tout, mon
avion reçut sa part de coups au but, mais je n'ai jamais
été touché physiquement.
J'ai épousé
ma fiancée, Bettyjeane Hill, le 30 mai 1945. Elle est morte
d'un cancer le 9 juillet 1985. Deux semaines après sa mort,
mon frère, qui était décédé plusieurs
années auparavant, me vint dans un rêve et me dit :
" Mike, ne t'inquiète pas au sujet de Bette, elle va
bien, elle est avec la famille ".
Michael N. Ingrisano,
Jr (11 mars 2002)
Michael
N. Ingrisano est l'auteur d'un livre
VALOR WITHOUT ARMS - A History of the 316th Troop Carrier Group,
1942-1945 - ISBN 1-57638-233-8 - Merriam Press
Michael N. Ingrisano, en
tant qu'opérateur radio, vola avec le 37th squadron d'Août
1943 jusqu'à la fin de la guerre. Son histoire est principalement
basée sur les rapports officiels. Elle contient d'abondantes
notes, des souvenirs personnels des membres du groupe et une liste
de 2700 noms.
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