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David 'Buck' Rogers
1st Sergeant, Hq Co, 1st Battalion, 506th PIR, 101st Airborne Division
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A notre arrivée à
l'aérodrome d'Upottery, le 31 mai 1944, nous fûmes
placés dans un endroit gardé. Après notre installation,
nous passions le plus clair de notre temps dans une large tente
d'informations. Dans cet endroit, il y avait des cartes murales,
des maquettes de sable et des photos aériennes. Nous assistions
à des conférences, étudions les cartes, les
maquettes et les photos aériennes. Nous apprîmes que
nous atterririons sur la zone de saut " C ", juste à
l'ouest de Sainte-Marie-du-Mont en Normandie. Ce village se trouvait
dans les terres près de la plage nommée Utah.
La nourriture à Upottery
était la meilleure que nous ayons eu depuis notre départ
des Etats-Unis. Nous avions de la crème glacée, du
pain blanc, du steak et bien d'autres bonnes choses que nous n'avions
pas eues depuis notre arrivée en Angleterre. Nous plaisantions
souvent en disant que c'étaient les derniers repas des condamnés.
Un jour avant notre départ
pour la Normandie, on nous donna des parachutes, des munitions,
des masques a gaz, des gilets de sauvetage, etc. C'était
le 3 juin, car nous devions initialement quitter Upottery aux environs
de 23h00, le 4 juin. Comme nous le savons maintenant, le Jour-J
fut retardé d'un jour à cause des mauvaises conditions
atmosphériques. Nous partîmes donc tard le soir du
5 juin.
Nous montâmes dans
des camions avec tout notre équipement aux environs de 21h00 le 5 juin et fûmes conduits à nos avions. En descendant des camions,
nous mîmes nos parachutes, gilets de sauvetage, et tout le
reste que nous portions. On nous donna des pilules contre le mal de
mer. Nous montâmes dans les avions vers 22h30. Cela n'était
pas tache aisée que de monter dans les avions avec tout cet
équipement, les armes et les munitions. Je portais un fusil
30.06 M-1, un pistolet Colt 45 automatique, un couteau de tranchée
et des grenades à main. J'avais également la charge
d'un grand drapeau orange que je devais sortir pour nous signaler
si je voyais d'autres forces qui avaient débarqué
sur la plage. On nous donna aussi des francs français, combien,
je ne m'en souviens pas. J'en ai gardé quelques-uns uns que
j'ai toujours. Chacun de nous avait également un genre de
cricket métallique qui nous servait à nous identifier.
Une pression, "click-clack" devait recevoir comme réponse
deux "click-clack".
Mon avion décolla
à 23h15. Si je me souviens bien, il ne faisait pas encore
tout à fait nuit. Il fallut beaucoup de temps pour organiser
en formation tous ces avions en vol vers la Normandie. Nous nous
dirigeâmes finalement vers le sud et notre destination, volant
à 150 mètres au-dessus de la mer. Nous ne parlâmes
pas beaucoup durant le vol. Je pense que la plupart des hommes pensaient
à ce qui allait arriver.
Arrivant près de l'île
de Guernesey, les avions commencèrent à tourner à
l'est vers les côtes normandes. Quand nous fûmes au-dessus
de la côte, les avions entrèrent dans une couche nuageuse
ou bien du brouillard. C'est à ce moment, que certains des
avions perdirent la formation. Les pilotes avaient reçu l'ordre
de garder la formation à tout prix; la plupart le firent,
mais certains ne le purent pas. A cause de cela, des parachutistes
furent largués à des kilomètres de leur zone
de saut. Le pilote de mon avion garda la formation et nous volâmes
directement au-dessus de notre zone de saut " C ". Nous
eûmes du mal à larguer un mortier juste avant notre
propre saut et cela nous retarda quelque peu.
Quand mon parachute s'ouvrit,
j'étais directement au-dessus du clocher de l'église
de Sainte-Marie-du-Mont. C'était la pleine lune et le ciel
avait peu de nuages. Nous pouvions voir facilement ce qui se passait
au sol. Quand je regardai en bas, je vis Sainte-Marie-du-Mont. Ca
ressemblait à la photo que j'avais tant étudiée
à Upottery. Je sus, sans équivoque, que j'étais
au-dessus du clocher de l'église de ce petit village français.
Je forçai mon atterrissage
sur les environs du village et j'atterris avec mon parachute dans
un petit taillis. J'étais probablement à une vingtaine
de mètres des habitations. Je sortis de mon parachute et
regardant autour de moi, je vis une ombre qui se dirigeait vers
moi à une cinquantaine de mètres, le long d'une haie.
J'activai mon cricket et reçu un double click en retour.
Nous avançâmes l'un vers l'autre et je reconnus mon
Sgt. Major, Issac Cole. Nous fûmes très heureux de
nous revoir.
A ce moment, des avions transportant
des troupes volaient au-dessus de nous et des coups de feu éclataient
dans toutes les directions. Très vite, le Sgt. Cole et moi-même
formèrent un groupe avec 6 ou 7 autres parachutistes que
je ne connaissais pas. Je ne leur ai même pas demandé
leurs noms ni à quelle unité ils appartenaient. Nous
étions tout simplement contents d'être ensemble.
Après en avoir discuté,
nous nous dirigeâmes vers l'église et le centre du
village. En marchant le long de la rue, nous décidâmes
de frapper à une porte et d'essayer d'obtenir quelques informations
au sujet de l'ennemi. Un vieil homme répondit à la
porte. Un des hommes de notre groupe parlait un peu de Français
et lui demanda où étaient les Allemands. Agitant la
main au-dessus de sa tête, il répondit: " Partout!".
Nous continuâmes notre
route vers l'église et entrâmes dans l'édifice.
Une partie de notre groupe fut posté en bas et l'autre partie
dans le clocher. Le Sgt. Cole, moi-même et trois hommes nous
nous installâmes dans le clocher. Du haut du clocher, nous
pouvions tirer et voir dans toutes les directions. Nous étions
déterminés à faire de notre mieux pour éviter
les mouvements de troupes allemandes à travers le village.
Le jour pointait déjà
et quand il arriva, je regardai vers la plage Utah et je vis le
plus fabuleux spectacle que je n'avais jamais vu. Il y avait des
centaines de bateaux aux abords de la plage. Je pus voir certains
des bateaux tirer sur la plage. Plus tard, des avions bombardèrent.
Plus tard encore, nous vîmes les bateaux déverser les
troupes sur la plage. Nous sûmes alors que le débarquement
avait vraiment commencé.
Un peu plus tard, nous vîmes
un parachutiste avançant sur le trottoir en rasant les murs des habitations. Il passa l'angle d'une maison où une autre rue menait à la place de l'église et s'écroula sur le trottoir. Nous entendîmes
le coup de feu et nous sûmes qu'il avait été
touché. Il ne bougea plus après sa chute; étant
probablement mort. Ce fut un triste spectacle. A ce moment, nous
réalisâmes que nous étions dans un jeu de mort,
où il faut tuer ou bien être tué. Après
quelques minutes, un soldat allemand arriva au coin du bâtiment
là où le soldat gisait et il lui fit les poches. Nous
commençâmes à tirer et il s'effondra en travers
du corps du parachutiste.
Plus tard ce matin-la, deux
soldats allemands arrivèrent dans le village dans un petit véhicule. Nous ouvrîmes le feu quand ils furent à notre
portée. Je me souviens que l'un d'eux avait des cheveux roux
et qu'il sauta hors du véhicule et courut sur le trottoir
sous notre position. Il regardait à droite et à gauche
essayant de savoir d'où venait le feu. Il n'alla pas très
loin avant de s'effondrer sur le trottoir, mort. Le conducteur du
véhicule fit marche arrière jusqu'à un bâtiment
et s'arrêta. Mais il était mort avant que le véhicule
ne stoppe.
Au début de l'après-midi, je vis un char américain
à a peu près 150 mètres, avec son canon pointé
sur le clocher. Je sortis mon drapeau et l'agitai violemment. Cela
ne nous sauva pas de quelques obus. Mais cela n'était pas
le char qui nous tirait dessus, mais un obus d'artillerie qui vint
très près du clocher. Au bruit, nous sûmes que
cela ne venait pas du char mais d'une autre direction. Un moment
plus tard, un autre. Celui-ci toucha le clocher au-dessus de nous
avec un grand bruit d'explosion. Des débris s'écroulèrent
et il y eu une grande brèche dans le clocher. Ce fut un miracle
que personne n'ai été touché.
Quelques troupes venant de
la plage et d'autres parachutistes arrivèrent dans le village
après l'incident du clocher et nous descendîmes du
clocher. Cole et moi allâmes chercher mon parachute qui était
resté accroché au buisson. Je coupai deux morceaux
de mon parachute que je pliais et plaçais dans mon sac. J'ai
toujours un de ces morceaux de mon parachute qui me fit atterrir
sur le sol normand.
Nous quittâmes Sainte-Marie-du-Mont
tard cet après-midi là et allâmes au Holdy.
Nous apprîmes là-bas que mon commandant de compagnie,
le Capitaine Patch s'y trouvait ainsi que quelques autres membres
de ma compagnie. On nous dit également qu'au Holdy ils avaient
capturé quatre canons et que le Sgt. William King avait tiré
sur le clocher de l'église de Sainte-Marie-du-Mont avec l'un
de ces canons. Ils pensaient que le clocher était utilisé
par les Allemands pour diriger des tirs d'artillerie.
A l'emplacement des quatre
canons, le sol était couvert de cadavres allemands et de
quelques corps de parachutistes américains. Ces parachutistes
étaient de notre groupe de mortiers. Ils avaient atterri
aux environs de ces canons et avaient été immédiatement
tués avant de pouvoir même sortir de leurs parachutes.
A la tombée de la
nuit, nous apprîmes que le matin suivant, 7 juin, nous nous dirigerions
vers Carentan.
David 'Buck' Rogers (30
Mai 2002)
Traduction réalisée par Arlette Lessig
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