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Anthony Leone
Omaha Beach - Seaman 1/c - US Coast Guard - LST 27
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Mon navire de débarquement,
le LST 27 des gardes-côtes américains quitta Falmouth
en Angleterre comme partie de la force-B et, le 5 juin 1944, nous
formâmes le convoi B-3, composé entièrement
de LST.
Nous avions les hommes de la 175th AT Company ainsi que d'autres
personnels du support. Nous avions aussi à bord une importante
équipe médicale avec deux docteurs, assignée
à notre bateau pour l'invasion. Notre système de communication
publique transportant la voix du général Eisenhower
au travers du bateau. " Votre attention pour un message du
commandant en chef du corps expéditionnaire allié.
"
" Soldats, marins et aviateurs du corps expéditionnaire
allié......Il finit son discours par " Implorons
la bénédiction du Tout Puissant sur cette grande et
noble entreprise. "
En attendant le hurlement sans fin des moteurs d'avion empêchait
toute tentative de tenir une conversation normale. Les C-47 transportant
les parachutistes faisaient clignoter leurs feux d'atterrissage
de la lettre 'V' pour victoire. Nous faisions partie de la Task
Force 126, Force de suivi 'B' sous le commandement du commodore
Campbell Edgar.
Nous sommes maintenant le
7 juin 1944 et nous entendîmes que Rome en Italie avait été
déclarée ville ouverte. Les obus des navires Texas
et Arkansas passaient au dessus de nos têtes dans un bruit
semblable à des locomotives lancées à toute
vitesse. Les obus de 88mm tombaient dans l'eau comme nous approchions
de la plage. Je ne pouvais voir la plage car une longue traînée
de fumée blanche recouvrait Omaha beach.
Vague après vague
durant la matinée, les C-47 remorquant les planeurs se dirigeaient
vers l'intérieur des terres. Les B-17 et les B-24 de la 8e
Air Force avaient largué les bombes près des têtes
de plage. Nous pouvions voir ce qui semblait être du bois
mort dispersé tout du long de la plage mais un second examen
avec des jumelles plus fortes révéla être les
corps des soldats morts flottant au gré de la marée.
Comme des abeilles fâchées, un essaim de P-38, P-51
Mustang, Spitfires et Hurricanes bourdonnaient au dessus de nos
têtes et disparaissaient à l'horizon en direction de
Vierville. Je pouvais voir des uniformes gris en haut des falaises
en direction de la pointe du hoc et des silhouettes portant nos
uniformes attaquant dans leur direction. Cela ressemblait à
une partie de cache-cache puis, après un moment, aucune silhouette
grise ne bougeait plus.
Notre LST ne pu approcher pour débarquer à cause du
nombre important de mines Teller ainsi que des tirs de mitrailleuses
balayant la plage. Beaucoup se perdaient dans l'eau près
de nous tandis que les canons de 88mm allemands visaient les bateaux
ancrés dans le voisinage. Un petit remorqueur fut touché
et un geyser d'orage jaillit vers le ciel. Après une tentative
stérile de débarquer plus tôt, nous arrivâmes
finalement le 8 au milieu de tirs sporadiques de snipers ou d'artillerie
de 88mm.
Le premier camion quitta
notre rampe et heurta une mine, propageant le feu aux véhicules
avoisinants. Bientôt les bruits horribles des cris perçants
remplirent l'air tandis que les hommes du 175th luttaient pour se
libérer des flammes qui avaient déjà consumé
les corps de leurs camarades. Une de nos officiers tira l'un des
soldats des débris éparpillés sur la plage
et le traîna sur la plateforme d'un tank, l'étendant
afin que les médecins puissent commencer à déchirer
fiévreusement les habits carbonisés de son corps.
Un sergent, sa veste en feu, se précipita hors des camions
en feu et plongea dans une grande étendue d'eau, provoquant
le dégagement d'un minuscule nuage de vapeur. Nos médecins
l'amenèrent rapidement à bord et commencèrent
à le traiter. Un panache de fumée noire monta des
camions et pu être distingué de loin sur la Manche.
Nous fermâmes les portes avant de sorte que nous ne pûmes
plus être témoins de la souffrance de ces hommes du
175th AT qui restaient prisonniers de la déflagration. Leurs
cris purent être entendus sur toute l'étendue de la
plage d'Omaha. La marée recouvra lentement les squelettes
noircis.
Nous débarquâmes
le reste du 175th AT plusieurs heures plus tard et les observâmes
tandis qu'ils se dirigeaient vers la plus proche sortie de plage.
Ils devaient perdre d'autres hommes à cause des SS Allemands
quand, peu de temps après, un certain nombre furent faits
prisonniers. Ceux d'entre eux qui portaient un dog tag les identifiant
comme juif furent tués sur place entre les haies, si nombreuses
dans le bocage.
Le 19 juin, nous étions
en route pour débarquer à la plage d'Utah quand le
LST 523, transportant des hommes du 300th Engineers, heurta une
mine ou fût torpillé. Une centaine d'hommes du génie
devinrent des morceaux de chair flottant dans les eaux de la Manche.
Le Jour-J était, en
effet, le jour le plus long et il ne finirait pas, pour beaucoup
d'entre nous, jusqu'à la fin de la guerre. J'ai reçu
une décharge médicale en 1946, puis ai été
soumis à un traitement d'insuline. Aujourd'hui ma jambe est
encore engourdie à cause de l'explosion d'une mine sur la
plage d'Omaha bien après le Jour-J. Les survivants du LST
523 reçoivent aujourd'hui un bulletin mensuel et nous aimons
échanger nos mémoires par email ou courrier.
Les cris de ces hommes emprisonnés
dans les camions brûlants sur la plage d'Omaha continueront
à me hanter le reste de ma vie.
Je suis le plus grand argument contre la guerre, participant à
des émissions de télévision, écrivant
des livres et présentant des exposés dans les écoles
locales, insistant sur la futilité de la guerre.
Paix.
Tony Leone US Coast Guard LST
27 (04 Novembre 2002)
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